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La crise financière de 2008 déclenchée par les « subprimes » a entraîné dans la monde entier la faillite de banques, la mise en difficulté d’entreprises, des licenciements, un recul de la croissance et une aggravation des dettes souveraines, assortis d’une kyrielle d’effets nocifs que sont chômage, tensions sociales, montées des extrémismes politiques et crise de la démocratie. Pourquoi et comment est survenue cette crise financière ? Comment éviter de nouvelles crises ?

Un terrain propice

Plusieurs conditions réunies avant 2007 permettent et favorisent le déclenchement de la crise des subprimes :

- une masse monétaire importante circule dans les marchés financiers. Cette masse provient d’un accroissement des revenus du capital par rapport à ceux des salaires dans la masse du PIB (perte de 10 % du PIB pour la part des salaires entre 1982 et 2006). Le chômage de masse contribue en effet, par le jeu de l’offre et de la demande d’emploi, à tirer les salaires vers le bas et à accroître la part du PIB allant aux revenus du capital (revenus des dirigeants, dividendes des actionnaires, stock-options, etc.).

- l’importante masse d’argent en circulation, captée au détriment des salaires, favorise les spéculations et nourrit une certaine euphorie boursière. Cette relative euphorie anesthésie la prudence des investisseurs, y compris celle des banques.

- une spéculation notamment sur l’immobilier nourrit une bulle immobilière, en particulier aux États-Unis.

Les subprimes

Les subprimes sont créées dans les années 1990. Elles reflètent la promesse électorale de Bill Clinton de permettre à tout Américain, même modeste, d’accéder à la propriété. Des banques accordent des prêts immobiliers à des ménages modestes (donc peu solvables). La garantie pour la banque est que ces prêts sont hypothécaires, c’est-à-dire que, si l’emprunteur ne peut plus rembourser ses traites, la banque devient propriétaire de la maison. Dans le contexte de prix soutenus de l’immobilier, les subprimes restent non dangereuses jusqu’en 2003. Elles ont certainement permis à de nombreux Américains modestes d’accéder à la propriété. Ce concept a même fait partie du programme électoral de Nicolas Sarkozy en 2007.

Le risque bancaire dans les subprimes

Les prêts « subprimes » comportent tout de même un risque pour les banques : si jamais les prix de l’immobilier s’effondrent, la valeur de la maison devient inférieur à celle du prêt ; et si les emprunteurs cessent de payer leurs traites, les banques se retrouvent propriétaires de maisons qui ont une valeur marchande inférieure au prêt consenti, dans une opération devenue déficitaire. C’est malheureusement ce qui se produira.

La titrisation des subprimes

Pour ne pas supporter le risque d’effondrement du prix de l’immobilier sur leurs seules épaules, les banques transforment les prêts subprimes en actions financières vendues sur le marché mondial : elles les « titrisent ». Cette pratique de la titrisation offre un autre avantage pour la banque : comme elle permet de contourner l’obligation faite aux banques de conserver en fond de caisse au moins 8 % du capital prêté, la banque peut prêter plus d’argent qu’elle n’en a théoriquement le droit et peut ainsi accroître ses profits. L’appât d’un gain toujours plus grand, sans limite, pousse à la création de produits financiers complexes, qui masquent la conscience du risque encouru.

Quoiqu’il en soit, les actions représentant ces prêts subprimes se retrouvent disséminées dans des banques du monde entier, notamment européennes et françaises. En cas d’effondrement de l’immobilier aux États-Unis, de cession de paiement des emprunteurs et d’effondrement des cours des actions subprimes, c’est l’ensemble du système bancaire mondial qui se trouve mis en difficulté financière – à différents degrés selon le degré de possession de titres subprimes.

Course à la consommation de biens par des prêts à taux variables, non capés

Cette situation se conjugue avec un endettement des ménages américains modestes qui, pour acquérir des biens de consommation en dépit de leurs revenus modestes, ont contracté des prêts à la consommation. Beaucoup de ces prêts, malheureusement, sont à taux variable et ne sont pas « capés » (l’élévation de leur taux d’intérêt n’est pas plafonnée). Ils sont donc risqués : si les taux d’intérêt augmentent, les ménages, dont les revenus demeurent limités, ne se trouvent plus en situation de les rembourser. Or, les ménages ont consommé des biens et pris des risques au-delà de leurs moyens financiers. Les banques qui leur ont accordé ces prêts sont tout aussi responsables de cette situation.

La situation avant la crise

La situation aux États-Unis en 2003 est la suivante :

- Nombre de ménages modestes ont acheté des maisons avec des emprunts subprimes ;

- Nombre de ces ménages modestes ont également contracté des prêts à la consommation à taux variable et non capé ;

- Une spéculation sur l’immobilier a créé des prix élevés et une « bulle » dans ce secteur, qui, comme toute bulle spéculative, ne demande qu’à éclater.

La crise des subprimes

Entre 2004 et 2006, la FED (Réserve Fédérale Américaine) augmente sensiblement ses taux d’intérêt, qui passent de 1 % à 5 %. Ceci va provoquer deux premiers effets néfastes :

- les ménages n’ont plus les moyens d’emprunter à long terme. Ceci fait chuter le nombre d’emprunts immobiliers, ce qui fait à son tour chuter le prix de l’immobilier. La bulle spéculative sur l’immobilier est en cours de correction, d’explosion.

- le coût de remboursement des emprunts pour des biens de consommation, qui étaient à taux variables et non capés, augmente pour les ménages emprunteurs et les met dans une situation financière difficile, particulièrement pour ceux qui remboursent déjà des traites d’emprunt immobilier.

Ces deux phénomènes se conjuguent pour produire le nouvel effet suivant : les ménages modestes qui ont acheté des maisons avec des prêts subprimes ont du mal à rembourser leurs traites. Par ailleurs, le prix de l’immobilier a chuté et leur maison a perdu une grande partie de sa valeur. La valeur de leur maison est descendue en dessous de la valeur de l’emprunt qu’il leur reste à rembourser. Quel est alors leur intérêt ? Ils cessent de payer leurs traites et, à tout prendre, préfèrent abandonner leur maison à la banque pour se débarrasser de l’emprunt.

En conséquence, les banques prêteuses se retrouvent soudainement propriétaires de maisons dont la valeur est moindre que le prêt qu’elles ont consenti, maisons que personne ne veut racheter puisque le prix de l’immobilier continue de baisser. Les banques se retrouvent alors en situation de déficit sur ce produit financier.

Conséquence directe et immédiate : les titres bancaires représentant les subprimes s’effondrent. Plus personne n’en veut ; chacun cherche à s’en débarrasser.

Course à la consommation des ménages et course au profit des banques : une crise de société

Derrière cette crise financière des subprimes, il importe de repérer des comportements humains qui en sont des déclencheurs essentiels :

- des ménages avides de biens de consommation ont emprunté à taux variable et non capé, en toute inconscience des risques encourus, malgré leurs revenus modestes ;

- des ménages qui n’en avaient pas les moyens financiers ont également emprunté pour acquérir à tout prix un bien immobilier, sans en mesurer non plus les risques ;

- des banques, motivées par la recherche de profit sans limite, ont vendu des prêts à des ménages qui n’en avaient pas les moyens financiers et ont titrisé ces emprunts sur le marché financier mondial, faisant courir un risque au réseau bancaire mondial, et par cascade à l’économie mondiale.

Si les consommateurs et les banques avaient su mesurer leurs risques et avaient pu maîtriser leur « compulsion » à la consommation et au profit, une telle situation ne serait pas arrivée : les ménages n’auraient pas contracté des prêts à la consommation ni immobiliers risqués ; les banques n’auraient pas vendu des prêts hypothécaires risqués ni titrisé ces produits.

La « compulsion » à la consommation et au profit ont effacé la conscience du risque aux yeux des ménages et des banques, ce qui les a conduits, eux et le monde entier, à la catastrophe. Ce phénomène doit nous faire méditer sur les conséquences de la recherche du profit et de la consommation comme fins en soi, comme « fuite en avant compulsive » dénuée de réflexion sur les conditions du « bonheur ». La philosophie – ou la spiritualité, ou la morale – a déserté les principes qui gouvernent nos sociétés et les citoyens, ce qui les a conduits au désastre financier, économique, social et politique, dont on n’a pas fini de voir les conséquences ni de payer la facture. Il y a à réfléchir sur cette question pour les années et décennies à venir si l’on veut songer à construire une « société durable ».

L’aveuglement du « gain élevé sans risque »

Un autre phénomène est à pointer. Il existe une loi fondamentale dans les placements financiers qui est la suivante : plus le rendement d’un placement est élevé, plus ce placement est risqué ; plus un rendement est bas, plus il est sûr. Ceci, n’importe quel étudiant de première année d’économie le sait. Les subprimes titrisés ont été intégrés dans des produits financiers complexes et relativement opaques. Les agences de notation les ont notés AAA, c’est-à-dire « sans risque ». Les banques du monde entier ont proposé à leurs clients des « SICAV monétaires dynamiques », avec une promesse de rendement élevé et une « absence de risque ». Ceci est un non-sens, que cependant personne n’a dénoncé. Pour quelles raisons ? Le directeur de banque est heureux d’augmenter son chiffre d’affaire, son profit et son salaire ; l’épargnant est heureux d’accroître son rendement sans augmenter sa prise de risque ; l’employé de banque ou le conseiller d’affaire est heureux d’augmenter son chiffre d’activité et sa prime à l’intéressement. Chaque maillon de la chaîne y voit un bénéfice personnel – sans voir le risque pour tout le monde (y compris pour lui-même). La seconde leçon à tirer est que l’appât du gain aveugle sur les risques encourus, même pour des personnes intelligentes. « Ventre affamé n’a pas d’oreilles ». Dit autrement, l’appât du gain fait perdre la raison.

Crise financière et bancaire

Les ménages américains modestes, ne pouvant plus faire face à leurs traites et confrontés à l’effondrement du prix de l’immobilier, préfèrent abandonner leur maison à leurs créanciers plutôt que de continuer à payer les traites. La banque hérite d’une maison qui vaut moins que le prêt consenti. Le produit financier du prêt subprime est déficitaire. Le cours des titres subprimes (pourtant noté AAA) s’effondre sur le marché mondial. Les organismes vendeurs de subprimes ferment les uns après les autres. Les banques du monde entier doivent intégrer ces pertes dans leur bilan. Chaque banque perd confiance en ses consœurs. Les banques ne veulent plus se prêter d’argent entre elles. Le fonctionnement normal de la finance mondiale est bloqué. C’est la crise financière et bancaire.

La faillite de Lehman Brothers et l’effondrement général

Le 14 septembre 2008, le gouvernement américain décide de ne pas sauver la quatrième banque d’affaires américaine, Lehman Brothers, qui avait voilé la réalité de ses pertes sur les subprimes et un ensemble de produits toxiques. Au lendemain de sa faillite, les investisseurs du monde entier paniquent, car toutes les banques du monde sont clientes de Lehman Brothers. Le cours des produits financiers s’effondre. Ceci provoque l’effondrement des fonds propres des banques, parce que ces fonds se trouvaient maintenus de façon artificiellement élevés par de la spéculation dite en « prop trading » pratiquée par des traders de la banque. Cette augmentation artificielle des fonds avait pour objectif de permettre aux banques d’augmenter leur chiffre d’affaire et leurs profits en respectant (en apparence) les ratios imposés par la réglementation internationale. Les cours financiers s’effondrant, les fonds propres des banques s’effondrent de même (puisqu’ils étaient virtuels). Les banques ne disposent plus suffisamment de fonds propres pour exercer normalement leur activité. Une nouvelle vague de défiance vient mettre en péril la survie de chaque banque, donc du système tout entier, dans un risque de faillite dite « systémique ».

La crise financière provoque une crise économique

La banque est un carburant essentiel du développement et du fonctionnement normal de l’entreprise. Sans banque, pas de développement industriel et économique, pas de développement des entreprises, pas de survie des entreprises. Or, malgré l’intervention des États, qui ont injecté d’énormes liquidités dans les circuits financiers pour éviter le « crunch » du système bancaire, les banques se trouvent dans l’incapacité de prêter de l’argent aux entreprises à hauteur de leurs besoins, et en particulier les petites et moyennes entreprises (qui sont les plus susceptibles de créer de l’emploi). Les crédits bancaires sont réduits à la portion congrue. Les entreprises, manquant de carburant, étouffent. Elles licencient ou à tout le moins cessent d’embaucher. Le chômage s’aggrave. La croissance, déjà peu brillante, s’étiole. La crise financière est devenue crise économique.

Impacts aggravants sur les dettes souveraines

En 1978, la dette publique française représente 20 % du PIB. Elle en représente 90 % en 2012 (pour un montant total de 1.700 milliards d’euros). Pour quelles raisons ?

Le chômage de masse depuis les années 1980 a entraîné deux conséquences :

- des coûts sociaux plus élevés puisqu’il y a moins de salaires ;

- les salaires sont tirés vers le bas, parce qu’en situation de chômage de masse, l’employeur se trouve en position de force par rapport à l’employé dans la négociation des salaires. De fait, comme évoqué déjà plus haut, la part des salaires dans le PIB dans les pays de l’OCDE a dérapé de 67,3 % en 1982 à 57,3 % en 2006. Cette part des salaires a perdu 10 % de part du PIB, au bénéfice des revenus du capital (gros salaires, dividendes, stock options…). Cette perte salariale cumulée sur vingt-cinq ans représente 150 % du PIB (qui se sont orientés, eux, vers les fortunes personnelles, les spéculations et les bulles spéculatives).

Cette baisse de la part des salaires dans le PIB entraîne plusieurs conséquences :

- Les ménages consomment moins et l’État multiplie les crédits d’impôt, niches fiscales ou « primes à la casse » pour tenter de relancer la croissance ;

- Les recettes publiques sont moindres ;

- Les gens se trouvant en difficulté, les dépenses d’aide sociale augmentent.

Ces différents effets creusent directement les comptes et la dette publique.

Or, que produit la crise financière et bancaire en 2008 ? Elle asphyxie les entreprises, crée du chômage, ralentit la croissance et accroît les dépenses sociales. Elle creuse donc plus encore les comptes publiques. La crise financière vient donc aggraver les finances des États, au point que certains d’entre eux – Grèce, Espagne, Portugal… – se trouvent en situation critique. Notre pays est concerné au même titre s’il n’opère pas un vigoureux coup de barre d’assainissement des comptes, en jonglant habilement entre fiscalité et économies dans les dépenses.

La crise économique provoque une crise sociale et politique

Les entreprises sont ralenties, le chômage augmente, et avec lui le besoin d’aide sociale. Les États de leur côté sont endettés à un niveau critique ; ils doivent impérativement économiser et fiscaliser. C’est la crise sociale : des millions de citoyens se trouvent en situation de chômage, de pauvreté, de misère… et éprouvent aigreur, colère et ressentiment. Se produisent des manifestations, des occupation de sites, de la violence, des émeutes…

La crise sociale débouche sur une crise politique. Les victimes de la crise sociale se sentent délaissées ou trahies par la classe politique traditionnelle (UMP-PS). Elles sont sensibles aux sirènes des extrémismes politiques, dont les scores gonflent. Elles descendent dans la rue, provoquent des émeutes, réprimées par les forces de l’ordre. Les partis extrémistes autoritaires et totalitaires séduisent les masses au détriment des partis démocratiques et se tiennent en embuscade.

Rappelons-nous que la crise financière internationale de 1929 aggrava le chômage et la misère en Allemagne, déjà étranglée par le Traité de Versailles. Cinq ans plus tard, en 1934, Hitler et l’extrême droite accédaient au pouvoir par la voie démocratique. Cette extrême droite canalisa la colère populaire sous forme de nationalisme, de la désignation de boucs émissaires (comme le fait actuellement l’extrême droite française) et de desseins belliqueux. L’engrenage enclenché se termina par la Shoah, la Seconde Guerre mondiale et cinquante millions de morts.

Soyons clairvoyants sur les effets désastreux à long terme d’une crise financière internationale : lorsque les mécanismes (financiers, économiques, sociaux et politiques) sont enclenchés, il est souvent trop tard pour agir.

Absence de traitement contre le mal

Lorsque la crise des subprimes éclate en 2008, il est précisément trop tard pour arrêter quoi que ce soit. Toutes les conditions sont réunies pour que l’effondrement des titres subprimes se transforme en crise financière mondiale, en crise économique, en crise sociale et en crise politique, par une infaillible logique de dominos. Lorsqu’une bulle spéculative enracinée dans le système financier mondial éclate, plus rien n’est contrôlable. « Quand la spéculation est une goutte d’eau dans la production des entreprises, ce n’est pas grave ; quand la production est une goutte d’eau dans la spéculation, on ne contrôle plus rien », disait Keynes en 1936. Lorsque la crise éclate, il est trop tard pour la parer. Au mieux, les États s’efforcent-ils d’en amortir les effets autant qu’ils peuvent.

Est-ce à dire que rien n’est possible pour éviter une crise financière ?

Quelles préventions possibles ?

Au niveau national :

Tout pays d’économie de marché doit bien sûr prendre un certain nombre de mesures à sa propre échelle, parmi lesquelles : réglementation/interdiction de la titrisation de produits hypothécaires (minimum de 30 % de détention de ces titres par l’émetteur pour le responsabiliser sur les risques, par exemple ?), réglementation/interdiction des prêts subprime, des prêts à la consommation auprès de ménages peu solvables, de la publicité pour les crédits à la consommation, distinction des réglementations entre activités de dépôt et de spéculation…

 

Au niveau européen :

Il serait utile qu’un gouvernement européen, ou à défaut un ministère européen des affaires financières, ou à défaut la BCE exerce un contrôle vigilant sur les activités des banques européennes, relatif aux points évoqués ci-dessus (titrisation, subprime, conditions des prêts immobilier et à la consommation, distinction dépôt/spéculation…)

 

Au niveau mondial :

Mais une crise financière dévastatrice provenant d’un autre continent (comme par exemple l’Asie) ne peut être évitée que par sa prévention en amont, au niveau mondial, ce lorsque « tout va bien ». C’est en effet non pas lorsque la crise éclate, mais lorsque « tout va bien » qu’il faut agir. C’est au cours des périodes « calmes » que prennent naissance les crises à venir.

Trois objectifs au moins doivent être poursuivis :

- une réglementation toujours plus subtile des échanges financiers, dont la sophistication doit suivre la sophistication des produits, ce au niveau mondial ;

- des contrôles renforcés des produits et des échanges financiers au niveau mondial, sorte de « gendarme » mondial de la bourse aux pouvoirs renforcés ;

- une fiscalisation des échanges financiers (inspirée de la taxe Tobin) au niveau mondial, couplée à une éradication des paradis fiscaux. Cette fiscalisation n’aurait pas pour premier objectif de « détrousser » les investisseurs financiers, mais d’inciter ces investisseurs à investir leurs capitaux en direction de l’économie productive (donc l’emploi, donc les revenus des salariés, donc les recettes publiques) plutôt que dans la spéculation financière (dont nous observons les effets désastreux pour la collectivité). Son deuxième objectif serait de financer des politiques contre la soif, la faim, les maladies et la misère dans le monde – ce également, faut-il le préciser, dans l’intérêt même des pays riches.

Ces trois mesures préventives des crises financières mondiales ne peuvent se réaliser qu’à un niveau également mondial – États-Unis, Europe, Chine, Russie, pays émergents. À l’échelle d’un pays ou même d’un continent, elles ne seraient d’aucun effet.

À l’instar de l’ONU, de l’OMS, de l’OMC, du FMI, de l’UNICEF ou de l’UNESCO, pourrait et devrait donc être fondée une « Organisation Mondiale des Échanges Financiers », en charge de ces missions. Son objectif serait d’éviter toute crise financière et bancaire au niveau mondial.

La mission de cette instance poursuivrait l’intérêt de chacun des pays impliqués dans l’économie de marché mondiale, de telle sorte que chaque pays, sensibilisé à son propre intérêt, devrait favoriser la création d’une telle instance.

Un « néo-keynésianisme » préventif au niveau mondial

Dans les années 1990, une vague de néolibéralisme économique et financier prit le pas sur les anciennes conceptions interventionnistes. On encensait Hayek ; on raillait Keynes, jugé dépassé. Ces deux dernières décennies ont hélas montré que l’économie et la finance, lorsqu’elles sont livrées à elle-même dans un ultra-libéralisme débridé, génèrent des catastrophes en chaîne incontrôlables, dont nous, travailleurs et contribuables, devons in fine payer la facture.

L’esprit de Keynes, ce n’est pas nécessairement d’intervenir de façon abusive dans l’économie comme le colporte souvent l’image d’Épinal. Ce peut être simplement cette idée que le politique peut avoir – a – un rôle à jouer dans le domaine de l’économie pour en éviter les dérives ou les catastrophes. Car le politique a en charge le bien-être des citoyens, donc l’évitement des crises économiques, sociales et politiques majeures. Réguler et contrôler les échanges financiers quand tout va bien, c’est précisément éviter les catastrophes lorsque certains acteurs cupides et irresponsables vont trop loin dans la recherche du profit. C’est éviter les crises, la misère, les émeutes, l’accès au pouvoir des extrémismes politiques ou religieux, les guerres civiles ou internationales qui tueront des millions de personnes.

Contrôler et réguler collectivement les échanges financiers au niveau mondial est de l’intérêt de chaque pays. Aucun pays ne souhaite connaître de misère, de crise sociale ou de conflit sur son sol. Lorsque chaque pays aura pris conscience de son intérêt, une institution internationale de réglementation, de contrôle et de fiscalisation des échanges financiers verra peut-être le jour. Souhaitons-le.

Remettre l’économie sur ses deux pieds

Au-delà de cette question de crise financière, faut-il rappeler que l’économie de marché, ce n’est pas la spéculation financière à court terme, mais la production de biens, d’emplois, de revenus et d’argent public à long terme, pour l’intérêt de la collectivité et celui du citoyen. Nous savons que l’ultra-libéralisme financier et la spéculation détruisent l’économie de marché productive. Il importe donc de repositionner la place de l’entrepreneur et employeur au-dessus de celle du joueur de casino.

 

Enfin, d’une façon globale, différents éléments de l’économie mondiale et nationale sont interdépendants : éviter de nouvelles crises financières dévastatrices, remettre l’économie financière au service de l’économie productive (et non l’inverse), récupérer la part perdue des salaires sur le capital au sein du PIB, résorber la dette souveraine, combattre le chômage de masse, retrouver les moyens de financement de politiques éducatives, sociales et culturelles, et améliorer le niveau de vie des citoyens… Chacun de ces éléments est déterminé par et déterminant pour les autres.

Mais deux d’entre eux sont fondateurs parmi tous les autres pour la santé et la sécurité de l’économie : la création d’emploi et la régulation des échanges financiers.

 

Chr. Chomant

20-12-2012

 

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